Journalistes et députés
Ce Mardi après midi 14 Mars, reprise des travaux de la Commission dite d’Outreau: pour cause de nécessité jardinière, je n’ai pas vu l’essentiel de l’audition du procureur général de Douai. Dommage, pour une fois qu’un magistrat reconnaissait s’être trompé.
Par contre, je n’ai pas été déçu par les témoignages des journalistes qui suivaient. Certaines interventions gagneraient à être utilisées dans les établissements d’enseignement, tant ces gens, habitués à communiquer nous ont bien expliqué leur façon de travailler, dans des situations variées: l’urgence d’abord, où ils ont très peu de temps et où il faut recueillir l’information, la trier et l’utiliser.
Premier exemple: le journaliste reporter d’images (J.R.I.) de la locale de Boulogne (FR3) a bien expliqué qu’au début quand l’information sort, il faut fabriquer des images; il explique alors où il va , ce qu’il filme; il explique aussi le rôle de la concurrence quand elle existe, et pourquoi tout le monde fait les mêmes images au moment où elles se présentent. Il explique également très bien ce qu’il ne filme pas volontairement: ainsi la plaque de l’huissier mis en examen est filmée de loin , sans montrer la maison, ni indiquer la ville, pour éviter d’éventuelles représailles effectuées par des abrutis ( la maison des assassins dans une affaire locale précédente avait été incendiée): impact des images vues à la télévision.
On a l’air de disposer de plus de temps pour fabriquer un reportage destiné à un magazine télévisé; pas toujours quand même lorsqu’il faut convaincre d’éventuels témoins à s’exprimer devant la caméra ; ce n’est donc pas facile de mener une contre enquête lorsqu’on doute des informations transmises ou reçues. Les témoignages du journaliste français nommé pour suivre l’affaire pendant 3 mois, et celui du journaliste de la RTBF télévision belge sont édifiants à ce sujet. Et que se passe t’il lorsque les témoins parlent une langue flamande avec un accent si inhabituel qu’il faut un interprète particulier à celui qui comprend le flamand. L’affaire d’Outreau a eu en effet un épisode belge.
Brefs les journalistes de la presse télévisée ont bien conscience des difficultés et des limites de l’exercice et expriment des regrets pour certains dérapages (prises de vue des mis en examen avec menottes, visages non floutés par exemple, commentaires sans conditionnel, trop affirmatif.)
En soirée on passe à la presse écrite nationale: journalistes ayant écrit des articles au moment où l’affaire prenait un tour particulier: la fausse nouvelle fabriquée par un acquitté d’un meurtre de petite fille et les fouilles infructueuses qui suivirent. La correspondante dans le Nord Pas de Calais de Libération raconte ainsi la genèse des 3 ou 4 articles qu’elle écrit à ce sujet, et le malaise profond qui suit cette écriture; elle ne veut plus couvrir cette affaire; plus apaisée elle écrira plus tard un long article sur la vie à Outreau.
Etre journaliste ce n’est pas toujours évident.
Le relais est pris par ceux qui ont suivi les procès, et c’est vraiment très très très passionnant. Le chroniqueur judiciaire du Figaro, et Florence Aubenas de Libe sont des plumes importantes et ne se laisseront pas intimider par les interventions pénibles d’un certain député ancien magistrat moralisateur, spécialiste du rappel à la loi On apprendra ainsi que Florence Aubenas a eu le temps de lire et de consulter la totalité du dossier avant le premier procès ( ce qui est interdit , normalement: mais dans notre France où beaucoup de textes législatifs sont contournés, y compris par ceux qui les fabriquent, quoi d’exceptionnel ?); exemples à l’appui, elle analyse le mécanisme du déroulement des procès verbaux d’interrogatoire et démontre ainsi que le juge, en toute bonne foi, et sans s’en rendre compte alimentait les mensonges qui ont conduit à la mise en examen de gens. J’ai retrouvé tous les mécanismes utilisés en pédagogie dans la méthode maïeutique, où le pédagogue mène le dialogue et par le jeu des questions fait dire aux bons élèves ce qu’il a envie qu’il dise... La principale condamnée , Madame Badaoui utilisait astucieusement les situations provoquées involontairement par le juge. Fascinant...
Le journaliste du Figaro est une personnalité: sous des dehors un peu froids au départ, c’est un conteur hors pair, et il sait émailler son récit de petites réflexions personnelles pleines d’humour. Par petites touches, il semble démontrer que la justice avait senti avant le procès que le dossier d’accusation ne tenait pas et que les magistrats faisaient bloc pour éviter le désastre: description inénarrable des détails de l’arrivée du juge Burgaud pour déposer au procès de St Omer, avec protection rapprochée, CRS, etc... et coachée par une magistrate , bras droit du procureur général Yves Bot pour éviter les dérapages. Il contredit formellement la déposition sous serment de ce dernier la semaine dernière sa conférence de presse, avant les délibérations de la cour d’appel,au deuxième procès, a bien été organisée et non improvisée. Il donne des détails sur cette organisation et s’en amuse. Certains députés vont réagir alors vivement sur l’attitude du procureur.
La presse écrite ne veut manifester aucun regret, et elle le dit. Elle a fait son travail normalement, et on ne peut que la suivre sur ce terrain. C’est à la justice et à elle seule de faire son travail. Et à nos reprèsentants d’organiser au mieux le bon fonctionnement de ce pouvoir judiciaire en liaison harmonieuse avec la presse.
Par contre, je n’ai pas été déçu par les témoignages des journalistes qui suivaient. Certaines interventions gagneraient à être utilisées dans les établissements d’enseignement, tant ces gens, habitués à communiquer nous ont bien expliqué leur façon de travailler, dans des situations variées: l’urgence d’abord, où ils ont très peu de temps et où il faut recueillir l’information, la trier et l’utiliser.
Premier exemple: le journaliste reporter d’images (J.R.I.) de la locale de Boulogne (FR3) a bien expliqué qu’au début quand l’information sort, il faut fabriquer des images; il explique alors où il va , ce qu’il filme; il explique aussi le rôle de la concurrence quand elle existe, et pourquoi tout le monde fait les mêmes images au moment où elles se présentent. Il explique également très bien ce qu’il ne filme pas volontairement: ainsi la plaque de l’huissier mis en examen est filmée de loin , sans montrer la maison, ni indiquer la ville, pour éviter d’éventuelles représailles effectuées par des abrutis ( la maison des assassins dans une affaire locale précédente avait été incendiée): impact des images vues à la télévision.
On a l’air de disposer de plus de temps pour fabriquer un reportage destiné à un magazine télévisé; pas toujours quand même lorsqu’il faut convaincre d’éventuels témoins à s’exprimer devant la caméra ; ce n’est donc pas facile de mener une contre enquête lorsqu’on doute des informations transmises ou reçues. Les témoignages du journaliste français nommé pour suivre l’affaire pendant 3 mois, et celui du journaliste de la RTBF télévision belge sont édifiants à ce sujet. Et que se passe t’il lorsque les témoins parlent une langue flamande avec un accent si inhabituel qu’il faut un interprète particulier à celui qui comprend le flamand. L’affaire d’Outreau a eu en effet un épisode belge.
Brefs les journalistes de la presse télévisée ont bien conscience des difficultés et des limites de l’exercice et expriment des regrets pour certains dérapages (prises de vue des mis en examen avec menottes, visages non floutés par exemple, commentaires sans conditionnel, trop affirmatif.)
En soirée on passe à la presse écrite nationale: journalistes ayant écrit des articles au moment où l’affaire prenait un tour particulier: la fausse nouvelle fabriquée par un acquitté d’un meurtre de petite fille et les fouilles infructueuses qui suivirent. La correspondante dans le Nord Pas de Calais de Libération raconte ainsi la genèse des 3 ou 4 articles qu’elle écrit à ce sujet, et le malaise profond qui suit cette écriture; elle ne veut plus couvrir cette affaire; plus apaisée elle écrira plus tard un long article sur la vie à Outreau.
Etre journaliste ce n’est pas toujours évident.
Le relais est pris par ceux qui ont suivi les procès, et c’est vraiment très très très passionnant. Le chroniqueur judiciaire du Figaro, et Florence Aubenas de Libe sont des plumes importantes et ne se laisseront pas intimider par les interventions pénibles d’un certain député ancien magistrat moralisateur, spécialiste du rappel à la loi On apprendra ainsi que Florence Aubenas a eu le temps de lire et de consulter la totalité du dossier avant le premier procès ( ce qui est interdit , normalement: mais dans notre France où beaucoup de textes législatifs sont contournés, y compris par ceux qui les fabriquent, quoi d’exceptionnel ?); exemples à l’appui, elle analyse le mécanisme du déroulement des procès verbaux d’interrogatoire et démontre ainsi que le juge, en toute bonne foi, et sans s’en rendre compte alimentait les mensonges qui ont conduit à la mise en examen de gens. J’ai retrouvé tous les mécanismes utilisés en pédagogie dans la méthode maïeutique, où le pédagogue mène le dialogue et par le jeu des questions fait dire aux bons élèves ce qu’il a envie qu’il dise... La principale condamnée , Madame Badaoui utilisait astucieusement les situations provoquées involontairement par le juge. Fascinant...
Le journaliste du Figaro est une personnalité: sous des dehors un peu froids au départ, c’est un conteur hors pair, et il sait émailler son récit de petites réflexions personnelles pleines d’humour. Par petites touches, il semble démontrer que la justice avait senti avant le procès que le dossier d’accusation ne tenait pas et que les magistrats faisaient bloc pour éviter le désastre: description inénarrable des détails de l’arrivée du juge Burgaud pour déposer au procès de St Omer, avec protection rapprochée, CRS, etc... et coachée par une magistrate , bras droit du procureur général Yves Bot pour éviter les dérapages. Il contredit formellement la déposition sous serment de ce dernier la semaine dernière sa conférence de presse, avant les délibérations de la cour d’appel,au deuxième procès, a bien été organisée et non improvisée. Il donne des détails sur cette organisation et s’en amuse. Certains députés vont réagir alors vivement sur l’attitude du procureur.
La presse écrite ne veut manifester aucun regret, et elle le dit. Elle a fait son travail normalement, et on ne peut que la suivre sur ce terrain. C’est à la justice et à elle seule de faire son travail. Et à nos reprèsentants d’organiser au mieux le bon fonctionnement de ce pouvoir judiciaire en liaison harmonieuse avec la presse.
0 Comments:
Enregistrer un commentaire
<< Home